L’Ystoire de li Normant, traduction française réalisée au XIVe siècle de l’Historia Normannorum d’Aimé du Mont Cassin (XIe siècle), est, sur le plan linguistique, un curieux ouvrage, rédigé par un Italien qui, ayant appris du français, ne maîtrisait pas suffisamment le français, il est vrai, en pleine mutation à l’époque. La langue du texte mêle latinismes (le latin d’Aimé maladroitement transposé), italianismes (comme la généralisation de l’équation « finale italienne en -a = finale française en -e ») et français mal assimilé, à commencer par ce li Normant du titre, forme de sujet en fonction de complément. Et pourtant, au prix d’une certaine gymnastique linguistique, le lecteur latiniste, helléniste, spécialiste de l’ancien français et connaisseur de la langue italienne, comprend assez bien le contenu de cette Ystoire, par ailleurs essentielle à la connaissance de la conquête normande de l’Italie du Sud au XIe siècle, puisque l’original latin est depuis longtemps disparu.